vendredi, juin 1 2018

Atelier : le social est-il réductible au biologique ?

Atelier organisé lors de la 2e édition de L'histoire à venir, festival d'histoire toulousain.

Avec Sidi Askofaré, Maurice Born, Jérôme Lamy

Les sciences humaines sont-elles définitivement séparées des sciences biologiques?

Cette rencontre voudrait renouer les fils de cette question à partir d’une double approche, celle d’un historien et celle d’un psychanalyste. Dans la perspective historique, l’ancrage biologique (par l’histoire des épidémies, des nosologies) est l’élément central de la compréhension du monde. Le biologique est-il pris dans les rets de l’histoire? Pour la psychanalyse, le biologique est un élément d’un ensemble de variations qui organisent le sujet. L’organisme et ses somatisations sont des points d’appui pour l’analyse. Le biologique est-il confiné dans la psyché? C’est à partir de ces questions que nous inviterons le public au dialogue.

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jeudi, avril 7 2016

Interviews de Pavlakis, lépreux de Spinalonga

Série d'interviews Maurice Born, Agia-Varvara, Athènes, 1972,1973.

Pavlakis, malade de la lèpre, interné d’abord à la station antilépreuse d’Agia Varvara (Athènes), puis sur l’île de Spinalonga pendant une quinzaine d’années.

Extrait 1 – durée 1 min 21 sec.

Ici, le lépreux qui n’a pas été marqué par le mal ne veut pas de nous les vieux, les estropiés. Il nous fuit. Non, ici, dans notre cercle, il ne nous évite pas, mais dehors, en société, il ne nous parle pas. L’autre jour à l’église (il s’agit d’une église qui se trouve dans l’enceinte de l’ancienne station antilépreuse), il y avait certains anciens malades, qui, guéris, habitent maintenant dans Agia Varvara, (dans les alentours de la station antilépreuse, précise Remoundakis). Bon, j’ai vécu ici avec deux d’entre eux. Aujourd’hui, sortis, ils n’ont aucun signe, ils sont comme les gens en santé. […] Quand ils m’ont vu, immédiatement, l’un des deux est sorti de l’église. Quant à l’autre, il s’est tenu à l’écart de moi d’une façon qui me désignait comme malade. Quand nous sommes sortis, je lui ai demandé : « Tu avais peur que je salisse ton image ? — Oui », il m’a répondu.

Extrait 2 – durée 37 sec.

Rien n’a jamais été obtenu de l’état sans combat. C’est-à-dire, jamais le directeur n’est venu nous voir en demandant ce qu’il fallait faire, peut-être fallait-il faire une chemin, ou aménager telle chose, ou faire venir tel médicament… en le considérant en tant que responsable, ou en tant qu’état, jamais. C’est nous qui le voyions, qui le demandons… et ils nous le refusaient… et nous devions mener de d’énormes combats afin d’obtenir satisfaction. C’est à dire… si nous avions eu le soutien des dirigeants, là notre société aurait été totalement différente.

Interview du docteur Grammatikakis, médecin et directeur de Spinalonga

Série d'interviews par Maurice Born, Agios Nikolaos, Crète, 1971.

Le Dr Emmanouil Grammatikakis est arrivé sur l’île de Spinalonga en 1924. Médecin en chef (et unique), il exerçait simultanément les rôles de directeur, de juge et de chef de la police de l’île. Il est resté en place jusqu’à 1952, soit 28 ans. Vers la fin de son exercice, il sera nommé médecin de district (nomiatros), et cumulera un temps les deux postes.

Quand je suis entré et j’ai trouvé la léproserie, elle était dans un état embryonnaire… c’est-à-dire, elle fonctionnait sur un mode primaire. Aucune thérapie… antilépreuse. Les soins médicaux dispensés étaient insignifiants, parce que les médecins n’habitaient pas le lieu, mais à Agios Nikolaos ou dans leurs villages. Nous avons mis en place des thérapies antilépreuses comme l’huile de chaulmogra ou les acides hydnocarpiques (l’acide hydnocarpique est en fait un extrait de l’huile de chaulmogra) et d’autres médicaments antilépreux… Quant aux soins généraux, étaient dispensés les soins habituels. […] On a construit sur l’île une salle de cinéma, une salle de loisirs, une salle d’auscultation, une église, installé du personnel, etc.